Cet entretien a été réalisé dans le cadre de la troisième édition du magazine La plus belle façon d'embaucher.
Regards croisés sur son parcours, raconté par lui-même, Nathalie Mantovani (directrice du Geiq BTP 85), et Fabrice Auneau (responsable de la planification de la main d’œuvre dans l’agence Eiffage Pays de la Loire).
Son arrivée en France
Alimou Diallo : Je viens de Guinnée-Konakry, pays d’Afrique de l’Ouest. Après un long voyage, je suis arrivé en France en 2017. Je n’avais que 15 ans et j’ai été accueilli par de la famille habitant à Angers. J’ai ensuite été placé en famille d’accueil en Vendée, puis dans un foyer des Etablières, où je suis resté presque trois ans. Tout de suite, je me suis concentré pour apprendre la langue française et j’ai commencé une orientation professionnelle, en CAP boulangerie, seulement durant un an car ça ne me plaisait pas. Je cherchais quelque chose dans le bâtiment, l’électricité, la plomberie. On m’a alors parlé du Geiq et j’ai pris rendez-vous avec Nathalie.
Sa rencontre avec le Geiq
Nathalie Mantovani : Dès qu’il a franchi la porte de mon bureau, c’est d’abord son immense sourire que j’ai vu ! Il était digne et très volontaire, ça je l’ai perçu tout de suite. Il m’a raconté son histoire, notamment qu’en Guinée ses parents tenaient un commerce de ventes d’outils pour le bâtiment. Lui, il avait connu les coulisses, le matériel, mais pas la partie opérationnelle. Mais il était tellement déterminé, il émanait de lui une lumière de force et de volonté. Après une heure d’entretien, j’étais convaincue, restait à franchir pas mal de difficultés car il était encore mineur, ne parlait pas le français impeccable d’aujourd’hui. Il fallait lui trouver une entreprise, il n’avait évidemment ni permis de conduire ni moyen de locomotion… J’ai réfléchi et, rapidement, j’ai pensé à Fabrice Auneau, du groupe Eiffage. Alors je l’ai contacté pour un rendez-vous. Je lui ai dit : « Rencontre-le, donne-lui sa chance, il le mérite vraiment ! »
Son intégration au sein du Groupe Eiffage
Fabrice Auneau : Alimou et Nathalie sont venus à mon bureau au printemps 2019. La rencontre a duré un bon moment, je lui ai posé beaucoup de questions, auxquelles il répondait du mieux qu’il pouvait en dépit de sa timidité de l’époque, qu’il n’a plus maintenant ! Ce qui m’a plu, au-delà de son envie, c’est sa forte volonté d’intégration dans la société française. Par exemple, il jouait dans le club de foot du coin, il aimait aller vers les autres, et il était à l’aise partout. Et ça, c’est fondamental car dans notre entreprise tous les chantiers se font en équipe. En plus, il arrivait au bon moment, puisque comme chaque année depuis 16 ans, nous prenons une personne proposée par le Geiq. Pour le tester, nous l’avons pris en stage d’observation durant 15 jours, avec Joël, un chef d’équipe très pédagogue, habitué à former des jeunes. Le chantier se déroulait au Conseil départemental, juste en face du logement d’Alimou. Comme ça, pas de soucis de transport ! Alimou s’est montré très intéressé, curieux, vif d’esprit, très impliqué. Il notait tout ce qu’on lui expliquait sur un petit carnet, affichant vraiment une grande détermination à se former au métier d’installateur sanitaire. Alors nous avons signé avec lui et le Geiq un contrat de deux ans, bien appuyé par le BTP-CFA, pour la partie formation professionnelle et théorique de son apprentissage.
Alimou Diallo : Depuis toujours, je lis tout le temps, je suis curieux d’apprendre, et pour moi c’était essentiel de maîtriser la langue française pour mon intégration, dans ma vie personnelle et sociale. Il ne faut jamais cesser de croire en soi, en son potentiel, en ses capacités, pour arriver à ses objectifs et concrétiser ses rêves.
Une médaille de plus !
Après avoir décroché en 2021 le titre de Meilleur Apprenti de France spécialité Installateur sanitaire, Alimou Diallo a remporté en juin 2022 la médaille d'or du Meilleur Apprenti de France, cette fois-ci spécialité Installateur thermique.
Un des meilleurs apprentis de France
Fabrice Auneau : Une fois dans l’équipe, Alimou se montre toujours curieux. Dans notre groupe, nous formons beaucoup d’apprentis, actuellement 19 sur 140 salariés. Alimou avait entendu dire qu’un apprenti avait remporté un prix départemental, et ça a tilté chez lui.
Alimou Diallo : J’en ai parlé à mon chef, qui m’a dit : « OK, mais tu as encore beaucoup à apprendre, il va falloir travailler dur et on voit ça dans un an. » J’ai commencé à travailler sur la pièce imposée fin décembre 2020, puis pendant trois mois, durant mes congés, mes week-ends, le soir après le travail, encouragé par mes formateurs. Après, j’ai remporté le concours de meilleur apprenti départemental, puis régional, et enfin le titre d’un des meilleurs apprentis de France au niveau national !
Fabrice Auneau et Nathalie Mantovani : Il lui a fallu quelque 300 heures de travail pour réaliser cette pièce remarquable, très propre, esthétique, presque parfaite. Ce qui a fait la différence avec les autres concurrents, c’est son souci du détail. Alimou est très méticuleux, même si parfois il faut le booster un peu ! Il y a pris goût puisqu’il prépare un deuxième CAP de chauffagiste et qu’il se relance dans le concours ! Plus tard, il devrait faire un brevet professionnel et rester chez Eiffage, une fois l’accompagnement Geiq terminé.
Alimou Diallo, Fabrice Auneau et Nathalie Mantovani : Tout ça n’a évidemment été possible que grâce à la volonté d’Alimou. Le Geiq joue un rôle de facilitateur, de mise en relation, d’intégrateur. Rien de magique là-dedans. Le cas d’Alimou est particulier, puisqu’il ne cochait pas vraiment les cases habituelles de nos bénéficiaires, notamment parce qu’il était mineur étranger isolé. Mais sa volonté a fait que tout le monde s’est mobilisé pour l’aider, notamment dans la partie administrative, essentielle. Le Geiq est là aussi pour aider dans les démarches administratives, vis-à-vis de la CAF, des impôts, de l’orientation et la formation, du logement, du permis de conduire, des transports, du renouvellement de son titre de séjour à la préfecture concernant Alimou. Aujourd’hui, il va avoir 20 ans. Il est autonome, parle un français remarquable, s’est intégré pleinement dans la société française et va être sans doute embauché en CDI chez Eiffage.
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